Ushuaia Nature, la forêt des mutants

Toutankhamon
Documentaire diffusé sur TF1, 97 minutes - Pays : France - 2001
Traversée par la flèche virtuelle de l'Équateur, l'île de Bornéo avec sa forêt impénétrable et ses montagnes inaccessibles, demeure à juste titre le rêve des explorateurs et des scientifiques. Au fil des millions d'années, la nature a fait ici son œuvre. Elle a sculpté le minéral, et donné à la vie sous toutes ses formes la clairvoyance de s’adapter pour ne pas mourir. Découverte au XVIe siècle par les navigateurs venus de l'Occident, cette île est loin d'avoir livré tous les secrets de son extravagante biodiversité.

Bornéo, l'île de la biodiversité et de toutes les extravagances

On peut évidemment se demander ce qu'on est venu faire dans une telle posture, la seule justification est autour de nous : c'est ce tableau géologique. C'est toujours époustouflant de voir ce que l'érosion, associée à la patience du temps, peut produire comme spectacle. Et très probablement qu’il y a 40 millions d'années était ici le fond des océans. Ce socle calcaire et de grès s'est soulevé par un chevauchement tectonique et est sorti à l'air libre. Depuis, au rythme des moussons, 5 mètres d’eau par an travaillent à éroder et à dégrader la roche, d'ailleurs tant en surface que sous terre, pour produire ces aiguilles que l'on appelle des pinacles, et qui ne sont rien d'autre que des témoins majestueux de l'empreinte du temps.

On est dans l’état du Sarawak, en Malaisie orientale, plus précisément dans l'île de Bornéo. Il faut savoir que les deux tiers sud de Bornéo sont indonésiennes. Le nord se divise en trois parties, les deux états malaisiens, le Sarawak et le Sabah, et le petit sultanat de Brunei, petit par la taille mais grand par son influence. On est dans le parc national de Mulu qui est une espèce de repli du monde, et qui protège une des plus anciennes forêts primaires du monde, une forêt tropicale, datant de 130 millions d’années. Et comme toutes ces forêts tropicales, elle est excessivement riche en variétés et en nombre d'espèces à l’hectare. Mais ce qui fait ici sa particularité, c'est que beaucoup de ces espèces sont rares et surtout d'une très grande originalité, à telle enseigne qu'on se demande si la nature n'a pas profité de son isolement pour n'en faire qu'à sa tête et se laisser aller à quelques extravagances.

Quoi qu'il en soit, le voyage de ce soir va commencer par une exploration d’une grotte qui se trouve être le dortoir de millions de chauves-souris, et notre voyage se terminera beaucoup plus loin, dans une autre grotte, mais sous-marine cette fois, qui était le cimetière de tortues marines. Dans l'intervalle, nous allons rencontrer quelques-uns des animaux emblématiques de la forêt de Bornéo, les orangs-outans, les écureuils volants, qui font partie de ces animaux qui ont tenté de voler mais qui sont restés au stade du "plané". Et puis, plus étonnant encore, ces insectes transformistes. Bref, un échantillon de ce qu'on appelle la biodiversité, c'est rien moins que cet héritage du temps mais pour le mettre en valeur, il faut se rappeler que 99 % de tout ce qui a vécu sur Terre est aujourd'hui éteint. Seuls subsistent ceux qui ont réussi à se faufiler à travers les multiples radiations et extinctions de l'histoire géologique. Raison de plus pour s'intéresser à eux et comprendre leur fonctionnement et leurs stratégies.

Descente et exploration de la grotte aux chauves-souris

Du haut de cette forêt de pierres, Nicolas contemple 50 000 siècles d’érosion. Au pied de ces tours silencieuses, la forêt a su retenir la matière organique nécessaire à sa croissance. Lasses de taillader et de dissoudre la matière en surface, les eaux de ruissellement se sont infiltrées dans le plateau sédimentaire, le truffant d'immenses cavernes souterraines parmi les plus vastes de la planète.

Dans l'une de ces excavations naturelles, baptisée la grotte aux Cerfs par les chasseurs-cueilleurs Punan, une équipe d'Ushuaia Nature prépare un engin d’exploration totalement original. Après 70 mètres de descente en rappel sur les cordes installées par les spéléologues, Nicolas, accompagné de Stéphane Girard, s'apprête à poser le pied sur le sol glissant de l'entrée de la grotte, où l'attend l'entomologiste Arthur Anker.

Parmi l'échantillon de ce qu'on appelle la biodiversité, il faut se rappeler que 99 % de tout ce qui a vécu sur Terre est aujourd'hui éteint.


Bienvenue dans le monde souterrain. Je vais en profiter pour vous montrer quelques bestioles. Faites attention, ça glisse partout, marchez plutôt sur les cailloux. L'odeur de guano, c'est quand même quelque chose. Ça, c'est le guano qui est encore frais, ce sont ces grosses taches noires là. Un peu plus loin, là où c’est brun, c'est le guano un peu retravaillé par les petites bestioles. Là, on va voir ce qui se passe en-dessous des cailloux : ça grouille partout à la surface. Le guano, ce sont les fientes des martinets et des chauves-souris, mais surtout des chauves-souris. Tu vois toutes les petites bestioles, ce sont des blattes, des coléoptères et je vois des forficules.

Toute une communauté animale qui vit, qui profite du guano qui est un élément très riche. Il y a à peu près une dizaine d'espèces qui vit ici, et qui évidemment attire les prédateurs. D'ailleurs sur les chauves-souris il y a une espèce de forficule qui est associée, qui les nettoie et qui mange les morceaux de la peau morte. Tous les insectes qu'on voit ici sont des décomposeurs : s'ils n'étaient pas là, la grotte serait comblée à moitié voire même plus. Et bien sûr, il y a des prédateurs qui se nourrissent de ces insectes là, les araignées, les milles pattes et même des scorpions. De plus, il y a de petits organismes microscopiques tels que les mites, les acariens, etc.

Ça, ce sont de jeunes chauves-souris qui tombent. Elles ne sont pas encore poilues, on voit bien la membrane. Quand les jeunes tombent, en général, on peut dire qu'ils sont perdus. Parfois, la mère, en prospectant la zone, arrive à retrouver le petit par les cris. C'est une chauve-souris insectivore de l’ordre des chiroptères. Il y a seulement 20% des jeunes qui survivent à une chute comme celle-là. L'ordre des chauves-souris est l'un plus important après celui des rongeurs. Il y a plus de 1000 espèces de chauves-souris dans le monde.

Après avoir observé quelques un des millions d'insectes grouillant sur le sol, Nicolas, Arthur et Stéphane s'enfoncent un peu plus avant dans les profondeurs de la Terre. Au loin, les hommes d'Ushuaia Nature peaufinent l'engin que n'aurait pas renié Jules Verne, et encore moins Léonard de Vinci.

C'est quand même une vision assez étrange, ça donne le sentiment d'arriver dans le repaire d'une société extraterrestre, planquée sous terre. Le plus étonné, c'est notre camarade entomologiste, parce que je pense qu'il connaît un par un les 150 000 insectes qu'on trouve à Bornéo, mais alors ces coléoptères-là, même à l’université... La cave fait à peu près 120 mètres de haut, 100 mètres de large et environ 500 mètres de long : c'est quand même l'un des plus gros vides souterrains qui existent sur la planète. Et ce n'est pas le seul ici, le sous-sol est truffé de grottes comme celle-là. Ce qu'on a vu depuis l'hélico tout à l'heure est une succession de dolines et un nombre de puits d'effondrement assez hallucinant. Sarawak Chamber est le plus gros vide qui existe.

Quand on plonge, on a toujours un deuxième submersible qui vient voir ce qui se passe, et là c'est la même chose, on a le vaisseau pour aller explorer, puis la petite sentinelle qui permettra de filmer et d’éclairer. Son nom est l’Aeroplume. Son cahier des charges à la fabrication, c'est un peu un poisson rouge, on est en équilibre dans le fluide et on a deux nageoires pour se déplacer dans l’air. Un engin assez étonnant, doté d'un ballon d'hélium de 130 m³, ce qui permet de lever une centaine de kilos. C'est particulièrement adapté à la circonstance, et en plus, à l'objet de nos investigations, parce que sur les sommets et sur la voûte de ses grottes, il y a des millions de chauves-souris et on va aller voir ça de plus près. Pour les voir, on a prévu un petit dispositif d'éclairage dans le ballon, le ballon va se transformer en lanterne. Ce n'est pas une lumière trop forte pour ne pas les effrayer mais ça permettra de les voir quand tu seras tout là-haut.

Voler près des chauves-souris grâce à l'Aéroplume

C'est quand même assez exceptionnel comme position, tu as vraiment le sentiment de flotter. D'ailleurs, le visuel comme les sensations s'apparentent beaucoup plus à un monde sous-marin qu’à un monde aérien. Même la vitesse de déplacement, qui est relativement lente par rapport à la masse du ballon, s'inspire d'un univers aquatique. Ce sont les balbutiements de cette façon de voler, mais elle a un certain avenir. C’est la sensation la plus irréelle et onirique que j'ai jamais ressentie. On sent les appuis sur l'air, c'est incroyable. Là, ce sont des infiltrations d'eau qui tombent sur le ballon, on va s'en éloigner un peu parce qu'il ne faudrait pas que le ballon s’alourdisse, car l'équilibre avec l'hélium se fait à quelques grammes près.

C'est quand même exceptionnel comme position, tu as vraiment le sentiment de flotter. C’est la sensation la plus irréelle que j'ai jamais ressentie.

Il est vrai que les chauves-souris provoquent plus souvent de la répulsion que de l’affection. Il faut pourtant reconnaître que dans le règne animal, ce sont quand même des animaux exceptionnels puisqu'elles se sont dotées au fil du temps de deux acquisitions biologiques quasiment uniques chez les mammifères : la première étant de voler, puisque c'est le seul mammifère qui vole, d'autres en sont restés au stade intermédiaire de pouvoir planer. Mais la deuxième acquisition biologique tout aussi remarquable, c'est leur capacité à pouvoir voler de nuit. L'explication, c'est que les chauves-souris sont dotées de l'équivalent d'un sonar, un système d’écholocalisation par contraction du larynx et par claquement de langue avec lequel elles envoient de petits signaux qui par écho leur reviennent.

Ils sont analysés par une espèce de membrane qu’elles ont en avant du pavillon de l’oreille - le tragus -, et comme les oreilles bougent indépendamment l'une de l’autre, elles arrivent à avoir une vision stéréophonique de leur environnement et une analyse très précise du relief. Et ce qui est amusant, c'est que ce système de sonar, très peu d'animaux l'ont, seulement quelques poissons et de très rares oiseaux, dont les salanganes, ces fameux martinets qui cohabitent dans ces grottes du Sarawak, et qui pour quelques-unes d'entre elles ont aussi ce système de localisation. L'éclairage intérieur de l'Aéroplume permet à Nicolas de surprendre les petits mammifères volant dans leur sommeil. Il l'éteindra pour ne pas les perturber longtemps et s'écartera de la voûte.

On est au niveau des dortoirs, et non pas des nichoirs, car les chauves-souris ne font pas de nids. Ce sont de toutes petites chauves-souris, on a du mal à les distinguer. Elles volent de partout, j'espère que leur sonar n'est pas en panne car cela ne me ferait pas du tout rire qu'elles percutent mon enveloppe d’hélium.

Toutes les grottes de Bornéo abritent des colonies de chiroptères, les unes frugivores, les autres insectivores. Ici, deux millions de chauves-souris de douze espèces différentes cohabitent en bonne intelligence. Chaque jour, aux alentours de 17 heures, la colonie sort de son sommeil. Quelques éclaireurs quittent la grotte pour s'assurer qu'il ne pleut pas. Des grappes entières volent alors en rang serré vers la sortie. Elles se rassemblent dans le ciel pour former d’immenses spirales tournoyantes. Grâce à cette technique, pas un heurt ne perturbe l'ordonnancement interne de ces formations. À un signal connu d'elles seules, elles s'abattent sur la forêt pour aller se nourrir.

Sortis de la grotte, on ne va pas aller très loin dans la forêt car on n’a pas beaucoup de défense contre le vent. On va essayer de retrouver notre ami Arthur, si tant est que cela soit possible, car il est toujours derrière un cloporte ou une araignée. C’est le caractère obsessionnel des spécialistes quand on est derrière eux, plus rien n’existe hormis leur sujet d’intérêt.

À la découverte d'insectes étonnants au rôle écologique majeur

Les insectes représentent 75 % de la biodiversité existant sur la planète. Environ 150 000 de leurs représentants habitent la forêt tropicale humide de cette île. Outre leur grand nombre et la variété des espèces, leur bizarrerie et pour certains, leur gigantisme, font ici leur spécificité. Leur autre dénominateur commun est l'incroyable stratégie du camouflage et du mimétisme, qu'ils ont mise au point pour échapper à leurs prédateurs, pour capturer leurs proies, et donc tout simplement pour survivre. Exemple : cette phyllie. Son corps, ses ailes, ses pattes, reproduisent les nervures, la texture, les mycoses et jusqu’aux dentelures de la feuille dévorée par un autre insecte. Stratégie identique chez ce phasme géant qui a choisi de ressembler à une brindille.

Les insectes représentent 75 % de la biodiversité existant sur la planète. Leur bizarrerie et pour certains, leur gigantisme, font ici leur spécificité.


D'autres insectes ont préféré se cuirasser. Mais ces larves de trilobites ne peuvent rien contre les doigts experts du biologiste. Arthur ne peut rêver meilleur endroit pour assouvir sa passion de scientifique. Avec ses assistants, il a installé en pleine jungle un mini-laboratoire pour observer in vivo ses protégés. Sous l’objectif de la caméra endoscopique reliée à un moniteur vidéo défilent des spécimens parfois inconnus de la science. Ce matériel lui permet d'observer en détail la morphologie d'un grand nombre de bestioles à nulles autres pareilles. Ce ver plat a trouvé ici l'humidité nécessaire pour survivre dans cette forêt.

Avec les éphémères, les libellules et les cafards apparus il y a 250 millions d’années, les insectes ont été les pionniers de la conquête du milieu terrestre. Les mantes ont ainsi eu le temps de parfaire une livrée d'une remarquable polyvalence, aussi efficace pour la chasse que pour leur défense. La discrétion n'est pas l'apanage de ces larves couvertes d'une cire immaculée. Sans doute s'agit-il d'une protection contre leurs éventuels prédateurs. La température homogène, le rayonnement solaire intense et constant selon les niveaux et l'humidité exceptionnelle sont les facteurs environnementaux responsables de l'exubérance de la forêt de Bornéo. Pour les biologistes, tous ses étages sont à explorer.

"J'espère que tu as de bonnes raisons, Arthur, de me convoquer en haut de ce figuier étrangleur. Ceci dit, c'est une vraie échelle." Cet étage, spécifique des forêts tropicales, s'appelle la canopée. Et il est bon de répéter l'importance que ça a, parce que beaucoup ignorent encore que 90 % des espèces végétales et 50 % des espèces animales vivent dans la canopée. C'est dire la part non négligeable de la biosphère que cela représente, et une grande majorité de ces espèces n'a pas encore été inventoriée. C'est pour cela que lorsqu'on se plaint à juste titre de la déforestation intensive, c'est parce que non seulement on aggrave l'érosion de la biodiversité, mais on compromet les chances de succès pour la médecine et la recherche, car beaucoup de clés des maladies et épidémies contemporaines ou de demain sont probablement dissimulées dans ces étages supérieurs des forêts humides tropicales.

Dans le monde animal, il y a une fraction qui correspond un peu aux mal-aimés, ou tout du moins aux ignorés : ce sont les insectes. Et pourtant quand on commence à s'intéresser comme le fait Arthur, à l'éthologie, c'est-à-dire la science du comportement des insectes, on s'aperçoit qu'en termes de facultés, de stratégies, ils ne sont ni plus ni moins exceptionnels que les autres, peut-être parfois même un peu plus. On a l'impression que pour compenser leur petite taille et leur vulnérabilité, ils ont développé des facultés tout à fait incroyables. Les insectes ont ceci en commun avec les végétaux ou les autres animaux, c'est qu'ils sont préoccupés par trois choses : se nourrir, se reproduire et survivre.

À ce titre, ils ont développé des tas de stratégies, mais l'une des stratégies les plus spectaculaires et d'ailleurs les plus efficaces, c'est la stratégie du mimétisme. Le mimétisme, c'est tout simplement essayer de se dissimuler et de se confondre avec son environnement, ou éventuellement de paraître pour ce que l'on n'est pas. On peut dire que le mimétisme, c'est paraître comme un autre animal, et on parle du camouflage - comme dans le cas des phasmes - qui inclut l’homotypie et l’homochromie. L'homotypie, c'est ressembler à une partie d'un végétal. Le phasme ressemble à une brindille, et en même temps cette espèce-là essaye d’en imiter la couleur : elle rassemble donc l’homotypie et l’homochromie.

Des phasmes aux mantes religieuses

Les phasmes sont des insectes absolument extraordinaires, il y en a environ 2000 espèces. On les appelle aussi communément les insectes-bâtons car c'est le plus grand insecte du monde, environ 55 cm avec les pattes étendues. On les appelle phasmes car cela vient du grec phasma qui signifie fantasme, illusion, apparition ou fantôme. Il est vrai qu'il faut avoir le regard averti pour pouvoir les voir dans la nature tant ils se confondent à la perfection avec leur environnement.

On pourrait se demander à quoi servent les insectes. Ils ont pourtant un rôle écologique majeur. D'abord, ils jouent le rôle de décomposeurs.

Ici, nous avons une sauterelle à tête de dragon, dont le nom scientifique rappelle un peu celui d'un dinosaure, le Megalodon. C'est un très beau mâle, et quand on l'embête un tout petit peu, il fait une parade de dissuasion en se mettant sur ses pattes arrières et montre son labio jaune, donc là normalement un oiseau ne doit pas le toucher car il risque d'être mordu gravement. Il y a aussi des couleurs qui peuvent dissuader certains prédateurs parce que ces couleurs signifient soit qu'il y a des toxines, soit un mauvais goût. Par exemple, il y a beaucoup de chenilles qui ont des soies urticantes et des couleurs très vives, afin de montrer que la chenille se nourrit de plantes toxiques. D'autres insectes en revanche se parent de couleurs pour duper leurs prédateurs.

On pourrait se demander à quoi servent les insectes. Ils ont pourtant un rôle écologique majeur. D'abord, au pied de ces arbres, ils jouent le rôle de décomposeurs, c'est à dire que toute la matière qui meurt, ce sont eux qui la décomposent. Schématiquement, ce sont eux qui permettent de rendre accessible ce qui meurt aux vivants et ils sont à tous les niveaux de la chaîne alimentaire, notamment en nourrissant les vertébrés.

Peut-on trouver les mêmes insectes au niveau de la canopée et au niveau du sol où chacun se répartit un territoire différent ? En général, il y a une stratification assez marquée, c'est-à-dire que chaque espèce occupe plus ou moins son étage. Mais il ne faut pas oublier que c'est une famille de l'ordre des insectes, les thysanoptères, qui pollinisent en fait toutes les espèces d’arbres dans cette forêt. Ce qui, en clair, veut dire que la forêt est soumise à la présence de ces insectes sans lesquels il n'y a pas pollinisation. Cela montre bien que l'écologie est un phénomène à la fois complexe, fragile et vulnérable.

Nicolas et Arthur font la découverte d’une espèce atypique au pied d’un arbre. "C'est une feuille morte avec des pattes ? C'est une mante religieuse ?" Effectivement, mais pas du tout comme la mante européenne. Les lobes, la couleur et la forme imitent un peu une feuille morte enroulée. Elle imite jusqu'aux nervures, jusqu'aux déchirures même parfois. En coinçant le tibia avec le fémur, elle peut attraper des petits insectes comme des abeilles, des papillons, etc. Entre elles, cela se passe plus ou moins bien. Si deux mâles ou deux femelles se rencontrent par exemple, elle peuvent être amenées à se battre. Mais en général cela se termine bien. Évidemment, quand elles sont sur leur support, elles sont convaincues de leur immunité, parce que c'est quasiment impossible de les distinguer.

Les lobes, la couleur et la forme imitent un peu une feuille morte enroulée. Elle imite jusqu'aux nervures, jusqu'aux déchirures même parfois.


Quand une mante vole, elle a un organe sur la face ventrale qui lui permet de repérer les ultrasons des chauves-souris, comme certaines sauterelles d’ailleurs. Dans ce cas-là, elle comprend qu'elle est chassée par une chauve-souris, elle se laisse alors tomber instantanément, disparaissant du sonar de la chauve-souris. Elle reste alors par terre, sans bouger, pendant une minute ou plus. Car, en réalité elles sont surtout vulnérables quand elles volent. Ça, c'est une mante-orchidée qui imite la fleur. C'est une espèce beaucoup plus rare, en général on la trouve sur des orchidées ou sur des fleurs de couleur blanche ou rosâtre. En aucun cas, ces insectes ne peuvent changer de couleur ou de forme en se déplaçant. Ils ont choisi un code couleur dès le départ et ils y sont soumis toute leur vie. On voit que le même ordre d'insectes peut générer deux formes différentes, l'une essaye d'imiter une orchidée, l'autre les feuilles mortes.

À l'assaut du Mont Kinabalu

Aux confins nord-est de l’île, dans l’État du Sabah appartenant à la Malaisie, le Mont Kinabalu domine du haut de ses 4101 mètres un océan de nuages masquant la forêt. Pilier géologique de l’île, il est la plus récente intrusion de granite et le plus colossal corps unique de roches du globe, dont seulement un dixième dépasse à l'air libre. Contemporain de la naissance de l'humanité, le Kinabalu pousse toujours son sommet vers le ciel en raison de 50 centimètres par siècle. Cette croissance rapide, en temps géologiques, a contraint la flore et la faune à s'adapter aux rigueurs du climat de ses pentes. Une équipe d’Ushuaia Nature emboîte les pas de John Naïr et son assistant.

Le scientifique arpente la montagne de haut en bas pour étudier les communautés de végétaux qui s’accrochent à ses flancs. Au-dessus de 3600 m d'altitude, seules quelques fissures dans le granite accueillent une végétation rabougrie. Un peu plus bas, entre les dalles de granite, des arbustes ont pris racine aussitôt envahis de lichens dont les Chinois raffolent pour leur pharmacopée. En décoction, ces précieux champignons contenant des algues symbiotiques auraient le pouvoir de calmer les crises d’asthme.

Contemporain de la naissance de l'humanité, le Kinabalu pousse toujours son sommet vers le ciel en raison de 50 centimètres par siècle.

Quelques centaines de mètres en aval, la flore change radicalement et se fait plus dense. C'est le royaume des plantes à urnes, les nepenthes. Faute d'un substrat assez riche, ces végétaux sont devenus carnivores. On trouve ici le plus grand nombre d'espèces et les plus grands spécimens. La taille de leurs feuilles, transformées en vasques profondes, varie de 2 à 35 centimètres. Avec son odeur de miel, la plus grande d'entre elles attire facilement ses proies. L'insecte glisse alors sur les bords du réceptacle dont les cils acérés se recourbent. Puis il tombe dans 2 litres de suc digestif dilué, où il se noie avant d'être assimilé par la plante.

Sous le doigt du scientifique, voici l'une des plus petites plantes carnivores connue à ce jour. Entre 3000 et 1800 mètres d’altitude s'étend la forêt des brumes où le taux d'humidité avoisine les 100 %. Les loris, des prosimiens, n’ont rien à redouter des plantes carnivores, même des plus grandes. Ils sont trop importants, trop agiles et fins chasseurs. Ces petits mammifères aux mœurs plutôt nocturnes ont beaucoup plus à craindre des pythons et des félins.

Des espèces endémiques parfois menacées

Le plus grand carnassier de la forêt du Kinabalu est un animal dont la puissance égale la discrétion. Très difficile à observer, la panthère nébuleuse ou longibande dans sa tenue de camouflage, hante les sous-bois à la recherche d'une proie conséquente. Les singes n'ont qu'à bien se tenir. Elle était autrefois très recherchée par les populations locales à des fins ornementales. Aujourd'hui à Bornéo, il ne subsiste hélas plus que quelques centaines de spécimens de ce splendide animal, remarquablement adapté à son environnement.

Depuis des décennies, les scientifiques tentent de dresser l'inventaire des espèces vivantes des forêts du Sabah. John Naïr et son assistant utilisent les passerelles installées dans la forêt de diptérocarpacées, ces grands arbres de 70 m de haut peuplés de ce qu'on peut appeler des mutants volants. Certains reptiles ou amphibiens sont ainsi capables de planer sur une courte distance. Dans ce monde arboricole où de nombreux petits animaux se laissent tomber des branches pour sauver leur peau ou pour chercher de la nourriture, quelques-uns ont différemment adapté leurs corps au vol plané. À quelques centimètres du visage de John Naïr, un gecko volant atterrit sur une feuille. Les palmures et les bourrelets ornant ses pattes et sa queue lui permettent de ralentir sa chute et de se poser à peu près où il le souhaite.

De tous les mammifères de la voûte feuillue ayant développé ses capacités étonnantes, le colugo, aussi appelé lémur volant, possède la surface de membrane de vol la plus importante. Animal nocturne, il est particulièrement difficile à apercevoir. À ce jour, une trentaine d'espèces planantes ont été recensées dans les forêts de Bornéo. La nourriture peu abondante, en raison d'une fructification aléatoire, oblige les animaux à se disperser davantage. En leur évitant de longs allers-retours vers le sol, le vol plané limiterait les pertes d'énergie. Cette hypothèse s’appliquerait uniquement aux mammifères.

Le rhinocéros de Sumatra est l'espèce la plus petite et la plus velue des rhinocéros vivant encore sur la planète. Rien ne peut enrayer son extermination.


John est redescendu des hautes frondaisons à la recherche d'un autre animal pour lesquels les jours sont probablement comptés. Il ne tarde pas à être sur les traces facilement identifiables laissées par son passage. La boue maculant ce tronc d'arbre en est la preuve. Au vu des larges empreintes laissées dans la terre gorgée d’eau, l'animal recherché les plus très loin. Avant lui, Sir Alfred Wallace, contemporain de Darwin, avait eu ici même tout le loisir d'en observer le comportement. Branches cassées, végétation vrillée par la mastication trahissent la présence récente du rhinocéros de Sumatra.

Il est l'espèce la plus petite et la plus velue des rhinocéros vivant encore sur la planète. 1,10 m à 1,50 m au garrot pour 800 kg, deux cornes nasales, une peau légèrement plissée, les oreilles frangées de poils, cet animal était autrefois largement répandu en Indochine et en Indonésie. Après avoir marqué d'urine son territoire, il part à la recherche d'une flaque de boue pour s'y vautrer. Celle-ci fera l'affaire. Fort de toute sa puissance dans une forêt où l'homme son seul prédateur, il écarte la fange de toute sa masse et imagine s'endormir en paix. Et pourtant, comme tous ses cousins d'Asie et d'Afrique, le rhinocéros de Sumatra est victime de braconnage et de la disparition de son biotope. Aucune mesure efficace n'est capable d'enrayer son extermination.

Sur l'île de Bornéo, Nicolas Hulot et son équipe vont découvrir bien d'autres animaux terrestres et surtout d'extravagantes espèces sous-marines. Dominée par l'imposante masse du Kinabalu, la forêt primaire a échappé aux terribles incendies qui ont ravagé le sud de Bornéo ces vingt dernières années. Ainsi ont été épargnés les orangs-outans de la réserve de Sepilok, mais les grands singes roux ne sont pas sortis d'affaire pour autant.

Les orangs-outans, récit d'une disparition programmée

Nicolas Hulot a rejoint Marie-Claude Bomsel, docteur vétérinaire, dans l'un des seuls centres de réhabilitation pour jeunes orangs-outans orphelins existant dans cette région. Ils font ça tous les matins, ils promènent ces jeunes qui ont deux ans et demi ou trois ans, qui ont été recueillis parfois à l'âge de quelques mois et ils les réhabituent comme ça, tout doucement, à la nature. Le retour à la vie sauvage n'est pas facile, aléatoire, et il y a un gros apprentissage. L'idée est d'essayer de leur redonner le goût à la vie sauvage, et surtout la confiance. La difficulté, c'est que ces centres de réhabilitation sont dérisoires en terme de volume par rapport à l'ampleur de la tâche et au nombre d’orphelins, puisque dans l’état du Sabah il est le seul, et il y en a un petit au Sarawak.

Le problème majeur, c'est que les petits sont tellement imprégnés, ils veulent retourner sans cesse sur les gens. On essaye de le rendre à la vie sauvage, mais il ne veut pas y aller. Et il a raison d'avoir peur, parce que pour lui la forêt n'est pas synonyme de tranquillité, ils ont tellement été perturbés quand ils étaient encore plus petits. Voyez la difficulté qu'ils ont à réapprendre à grimper, ça n'est pas aussi simple pour eux. En voilà un qui a commencé un peu de brachiation. Ils vont se délier lentement mais c'est vraiment trop long. C'eût était tellement mieux si la mère leur avait appris.

Il y a quelque chose d'excessivement troublant dans le regard d'un orang-outan. On a l'impression qu'il porte toute la détresse du monde animal, et Dieu sait que le sort des orangs-outans mais pas enviable car probablement, leur destin est déjà scellé tant leur territoire se réduit à une vitesse fulgurante. Il est aujourd'hui complètement morcelé. Or, pour la survie d'une espèce, on a besoin d'une continuité dans le territoire pour assurer la dispersion génétique qui est la seule garante de la pérennité, ce qui malheureusement n'est plus le cas pour les orangs-outans.

Ce sont des animaux très observateurs qui adorent regarder. ils passent près de 40 % de leur temps installés dans la forêt à regarder ce qui passe, ce qui leur donne une considérable mémoire. On dit souvent que ce sont les intellectuels du groupe, les chimpanzés sont plus agités, plus en conflit hiérarchique. Eux sont très observateurs. Et cette mémoire est à la base de leur fantastique capacité d’imitation, et l’imitation c'est la base de l’éducation, ce qui prouve sans doute non seulement une conscience de soi mais aussi une conscience de l’autre. Cette mémoire leur est d'ailleurs aussi utile dans le choix de leur nourriture, car les orangs-outans sont des botanistes hors-pair, capables d'identifier sans se tromper plus de 200 plantes ou graines différentes.

Il y a quelque chose d'excessi-vement troublant dans le regard d'un orang-outan. On a l'impression qu'il porte toute la détresse du monde animal.

Ils ont un calendrier mémorisé, car ils connaissent exactement à quel endroit et à quelle période ces plantes ou ces graines viennent à maturation. Cela explique leur longue errance d'arbre en arbre, et ils ont besoin d'un assez grand territoire pour avoir cette variété de nourriture qui est indispensable à leur équilibre biologique. C'est comme ça qu'ils vont disperser les graines et qu'ils vont faire fructifier en continu la forêt, ce sont vraiment des jardiniers, des cultivateurs fondamentaux.

Marie-Claude et Nicolas ont laissé les jeunes singes habitués à la présence humaine pour aller observer les orangs-outans sauvages. En voici un qui arrive : c'est une mère avec son petit, déjà plus dominante que les autres. Elle doit avoir une douzaine d'années, c'est la période de leur première reproduction, même si elle peuvent être matures sexuellement à sept ou huit ans. En général, elles commencent à 10-12 ans et prennent le pouvoir sur les subadultes.

Le petit est assez gros, il a près de 2 ans, il est proche de se détacher de sa mère. Tout doucement, elle va l'obliger en arrêtant de le nourrir car elle va avoir de moins en moins de lait. Ça fait partie de son apprentissage en fait. Elle ne partage pas, il apprend à travers elle. Il va essayer de lui voler des fruits, il y a presque une bagarre comme ça elle va le faire sortir tout doucement de son giron, c'est une meilleure solution plutôt que d'essayer de continuer à le surprotéger. C'est une solution qu'ils ont trouvé pour rendre leurs jeunes rapidement autonomes.

On a tendance à oublier que nous sommes primates tout comme eux, et de la même famille, celle des hominidés. Ils avaient été placés dans la famille des pongidés, mais grâce à la génétique, ils ont été rattachés à celle des hominidés, rejoignant les hommes, les chimpanzés et les gorilles qui sont tous deux Africains. C'est le seul grand singe d’Asie.

Il y avait un célèbre livre qui disait Avant que Nature ne meure, mais maintenant on pourrait dire Pendant que Nature meure. C'est ce contraste qui est d'ailleurs le plus saisissant, de voir d'un côté l'humanité qui continue de progresser dans une certaine insouciance, et dans le même temps la disparition programmée, rapide, de ces animaux remarquables et qui masquent derrière la cohorte d'autres animaux beaucoup plus insignifiants qui vont disparaître dans le même temps. Car très probablement ce sont des espèces qu'on appelle clés de voûte, et dans leur disparition ils entraîneront en cascade la disparition de centaines ou de milliers d'autres espèces.

Les secrets de la forêt avec les Kenyah

À 500 km au sud-ouest du territoire des orangs-outans, mais loin des luttes intestines et des violences qui agitent le sud de Bornéo, une autre équipe d’Ushuaia Nature a suivi un groupe de Dayaks de l’ethnie Kenyah dans leur chasse traditionnelle. L'occasion pour un père d'initier son fils à quelques-uns des multiples secrets de la forêt et de pérenniser ainsi des traditions ancestrales.

Amos est le dépositaire d'une manière de survivre en parfaite harmonie avec une forêt dont il connaît les pièges mais aussi les pouvoirs bénéfiques qu'elle procure pour qui sait la respecter et l’apprivoiser. "Cette plante est utilisée contre les maux de ventre. Tu découpes un morceau de feuille, tu la chiffonnes et puis tu sens son odeur. Ça sent fort. Au retour, on va l'écraser et on versera la décoction dans l'eau bouillante. On va en rapporter deux belles feuilles."

L'homme lit la forêt comme un livre grand ouvert : il connaît l'utilité de chaque plante. Amos s'est arrêté près d'un arbre dont le tronc est marqué de profondes entailles. Un spécimen rare, dont l'emplacement est bien connu des villages environnants. Un coup de machette dans l'écorce, et le sang blanc du végétal se met à couler. À l'état naturel, la sève dangereuse de cet arbre à poison est à manipuler avec précaution. Elle doit subir un petit traitement avant de devenir utilisable dans les pointes des flèches des sarbacanes.

S'il le souhaite, pratiquement tout ce qui équipe le chasseur Kenyah est fourni par la nature. Il suffit de tendre la main vers le bon endroit pour trouver ce dont il a besoin. "D'abord, tu t'assures bien que la feuille n'est pas percée et qu'elle est bien incurvée. C'est là que je vais verser la sève. Il ne faut pas toucher le liquide avec tes doigts, et surtout pas le porter à ta bouche. Cela peut te tuer. Maintenant, tu places la feuille au-dessus du feu. Tu la maintiens jusqu'à ce que la sève sèche et durcisse." La chaleur assèche et concentre les propriétés naturelles de la sève de l'arbre à strychnine. La pâte est devenue brun foncé. À ce stade, quelques milligrammes suffisent pour tuer un homme. Le moindre contact, même sur une peau saine, peut provoquer l’empoisonnement. Le jeune Kenyah observe. les moindres faits et gestes de son père. Plus tard, ce sera à lui de les répéter sans commettre d'erreur.

À la chasse au sanglier

Deux habitants du village partent rejoindre Amos et son fils. Comme toujours lorsqu'ils vont à la chasse au sanglier, leurs chiens les accompagnent. Le sanglier de Bornéo est le principal gibier de grande taille des habitants de l’île. Les populations de ces animaux sont souvent dispersées, excepté lorsque la nourriture au sol devient abondante, au moment de la fructification de toute une série d’arbres. Lorsque durian, mangue, ramboutan bien mûrs jonchent le sol, le sanglier pullule. C'est pour les Dayaks l'occasion de faire le plein de viande boucanée et de graisse fondue.

Amos n'est pas le seul à vouloir pérenniser les coutumes ancestrales du peuple Kenyah, le monde moderne a depuis longtemps frappé à la porte de son village.


Aidés de leurs compagnons à quatre pattes, les hommes ne tardent pas à être sur la trace du sanglier qu'ils recherchent. Encore faut-il le localiser et pouvoir s'en approcher assez près, une dizaine de mètres tout au plus. Toujours avec d'infinies précautions, l'homme extrait de son carquois une fléchette empoisonnée et montre à son fils comment armer la longue sarbacane taillée dans du bois dur. La traque touche à sa fin. La bête se trouve à quelques dizaines de mètres sous le couvert végétal.

En quelques minutes, le poison a paralysé les centres nerveux du sanglier. Le chasseur l'a achevé en plongeant dans son cœur la lame aiguisée comme une baïonnette prolongeant la sarbacane. La tradition veut que la dépouille de l'animal soit amenée au bord de la rivière pour y être soigneusement lavée et débarrassée de ses soies. Il n'est bien sûr pas question de cuire ou de découper la bête avant de l'emporter à la Long House, la grande maison communautaire. Là-bas, elle sera bouillie dans de l’eau très salée pour inhiber le poison inoculé par la fléchette.

Léchées par les flammes, les soies du sanglier se détachent sans difficulté. La bête pèse plus de 70 kg, mais les Kenyah sont robustes. Chargée comme un sac à dos, un seul homme assure son transport jusqu'à la pirogue. Amos n'est pas le seul à vouloir pérenniser, non sans difficulté, les coutumes ancestrales du peuple Kenyah. Car le monde moderne a depuis longtemps frappé à la porte de son village. L’équipe d’Ushuaia Nature poursuit sa descente vers la côte. Sur les rives de la rivière Kinabatangan, Marie-Claude Bomsel et Nicolas vont tenter d'apercevoir des primates bien connus pour leur étonnant appendice nasal.

À la rencontre des nasiques

Ce qui est curieux, c'est que les nasiques se dispersent dans la forêt bien que leur territoire soit la forêt côtière. Ils ne s'éloignent jamais beaucoup de l'eau, et reviennent tous les soirs dormir sur les arbres qui surplombent les rivières. C'est singes sont absolument extraordinaires, ils sont endémiques de Bornéo, on ne les a pas trouvés ailleurs. Ils sont extraordinaires pour plusieurs raisons : tout d'abord, ce sont des voltigeurs hors pair, ils font vraiment des sauts incroyables ; ils aiment l'eau, ils nagent bien et ce qui les caractérise entre autres, au-delà de leur couleur un peu orangée ou rousse, c'est que les mâles ont un appendice nasal linguiforme (on dirait vraiment une langue qui tombe, il n'y a pas le cartilage). Chez les femelles en revanche, c’est juste un petit bout de nez qui remonte.

Ils ont du nez, ils ont un très gros ventre, surtout les mâles. Mais ce sont des colobes, qui ont un système de digestion particulier un peu comme une vache. Ils ont un estomac compartimenté, ils ne ruminent pas mais ils fermentent des feuilles et beaucoup de choses, mais ils mangent près de 60 % de feuilles. La fermentation compense un peu la pauvreté de leur nourriture. Et comme il y a des bactéries, cela leur permet d'avoir des protéines en même temps. Iil y a certaines bactéries qui leur permettent d'éliminer un certain nombre de poisons et de toxines, parce qu'il y a des plantes et des arbres qui, au fur et à mesure de l’évolution, ont développé des poisons pour se protéger. Mais eux, parallèlement, se sont associés avec ces bactéries qui détruisent les toxines. Voilà une des astuces incroyables de l’adaptation.

Ils ont été obligés de monter très haut car ils sont en concurrence avec les macaques et les orangs-outans, qui sont plus au niveau du sol. Ils sont donc plus tranquilles là-haut. Il y a toute une colonie là. Les bonds qu'ils font sont spectaculaires. De temps en temps, ils font des erreurs pourtant, et dans ces cas-là ils tombent à l’eau, mais je suppose que ça doit quand même les amuser car ils sont aussi d'excellents nageurs. Par rapport aux orangs-outans qui sont assez solitaires, mâles comme femelles (car même si les femelles se baladent avec leurs petits, c'est rarement de gros groupes), la vie sociale est ici plus importante. Là-bas, c’est un harem. Il y a un mâle dominant, qui n'a pas besoin de beaucoup dominer car il semble que la femelle soit assez consentante, à cause du grand nez et du beau bidon certainement (rires).

Il y a des théories qui expliqueraient cet appendice nasal. Au fur et à mesure de l'évolution, les femelles ont préféré les mâles qui avaient de grands nez et, par sélection naturelle, tous les mâles ont maintenant des grands nez. C'est bien fait quand même le gouvernail de l’évolution. C'est très probable en effet, ce sont des attraits sexuels et c'est un signe de protection pour les femelles, donc elles ont intérêt effectivement à se mettre bien avec ces mâles costauds à grand nez, même si elles pratiquent le système de tantes, de nourrices.

Les femelles ont préféré les mâles qui avaient de grands nez et, par sélection naturelle, tous les mâles ont maintenant des grands nez.

Il y a en effet des femelles du même harem qui vont s'occuper des petits d'une mère, ce qui permet à cette dernière d'aller chercher des feuilles et des plantes. Certains petits gueulent souvent car il y a des nurses qui sont moins expérimentées et qui ont une façon assez maladroite de transporter les petits d’arbre en arbre. C'est pour ça que souvent ça piaille. Et justement, quand il y a un peu de pagaille, le rôle du mâle dominant est de remettre, par des vocalisations assez marquées, de l'ordre dans le groupe.

C'est vrai que c'est assez drôle de voir des nasiques venir dormir au bord de la rivière, mais l'évolution les a conduit à cela car autrefois, il y avait beaucoup de panthère longibandes ou des aigles. Et comme ça, au bord de la rivière, ils étaient protégés, et ça s'est inscrit dans leur patrimoine génétique. Donc ils viennent là par petits groupes, chacun va trouver son dortoir mais en tout cas, chacun s'appelle avant de s’endormir. Ce qui est encore plus drôle, c'est que quand ils sont complètement endormis, on peut les éclairer mais rien ne les fera bouger, à part un petit bout de la queue qui bouge.

Plongée sous-marine dans la mer des Célèbes

Sur la côte est du Sabah, Nicolas a rendez-vous avec le biologiste marin Laurent Ballesta. Ensemble, ils vont plonger sur le tombant d'une île exceptionnelle. Celle-ci est une véritable montagne sous-marine dont le sommet affleure la surface de l'océan. À quelques brasses de la plage, les fonds atteignent 600, et même 1200 mètres.

Le plus petit poisson du monde, ce serait le gobie nain des Philippines, qui doit faire environ 8 millimètres. De l'autre côté de l'échelle, le plus grand poisson du monde, et qui est bien un poisson contrairement à ce que son nom indique, est le requin-baleine, qui fait à peu près jusqu'à 18 mètres. Et on trouve ici, dans la mer des Célèbes, les deux espèces.

Entre elles, il y a environ 25 000 espèces de poissons réparties sur tous les océans du monde. Mais ici, c'est un endroit exceptionnel pour le monde sous-marin car on considère que c'est le pôle de la biodiversité sous-marine. En d'autres termes, c'est l'endroit au monde où il y a la plus grande variété d’espèces. On estime à 3700 le nombre des espèces de poissons ici présentes dans la mer des Célèbes. On appelle aussi cette région le centre de dispersion, c'est-à-dire que, sur une carte sur laquelle on placerait le nombre des espèces, plus on s'éloigne de cette région quelle que soit la direction, plus le nombre d’espèces diminue. On est vraiment ici dans la région la plus riche en espèces de poissons.

On explique cela tout d'abord par une grande activité tectonique mais aussi car il y a eu énormément de fluctuations du niveau de la mer dans cette région. Cela a permis d'isoler, de mélanger, de ré-isoler et de re-mélanger, et ainsi de créer à chaque fois de nouvelles espèces. Évidemment, on parle en temps géologiques. Bien entendu, les poissons ne sont pas les seuls habitants des océans, ils les partagent avec les mammifères et aussi les invertébrés comme les mollusques ou les gastéropodes. Justement, ces derniers tout comme les poissons ont, en terme de stratégie pour se défendre, rien à prendre aux insectes et réciproquement, parce que eux aussi ont développé des stratégies tout à fait efficaces.

La première d'entre elles, face à un prédateur, est d’essayer de se dissimuler, notamment en profitant de petites cavités dans le corail ou en s'enfouissant sous le sable. La deuxième, c'est de se battre, d'utiliser les armes. Et la première des armes, c'est un peu l’équivalent dans notre panoplie à nous, des armes blanches. Après, on passe aux armes électriques. À ce niveau-là, l'organe électrique devient à la fois un outil de chasse autant qu'un outil de défense. Et enfin, plus sophistiquées, les armes chimiques. Ce qui montre quand même l'élaboration incroyable dont ils se sont dotés au fil du temps, sachant quand même que la meilleure stratégie c'est d'éviter le combat et que pour cela, eux aussi ont recours au camouflage. Dès qu'on regarde avec un peu plus de précision sous l'océan, le petit est aussi remarquable que le grand.

D'innombrables espèces adeptes du camouflage

Aux abords de cet îlot qu'une légende a depuis des siècles préservé des pêcheurs, s’immerger est synonyme de bain de foule sous-marine. Pour observer les nombreux petits habitants de ce tombant vertigineux, on a installé une caméra équipée d'une optique grossissante reliée à un écran vidéo. Rien de cette petite porcelaine, d'un mimétisme parfait avec la gorgone dont elle profite du gîte et du couvert, n'échappe à l’objectif. Sur le corps de ce poisson-faucon à long nez, les lignes rouges se marient parfaitement avec les ramifications de la gorgone.

D'autres espèces de poissons appartenant à des familles différentes ont pourtant toutes choisi de ressembler à une feuille pour berner leurs proies et leurs prédateurs. C'est la stratégie de ce poisson-feuille cacatoès. À la couleur et à la forme, il ajoute le mouvement de la feuille morte noyée, ballottée par les courants. Le poisson fantôme-feuille mérite bien son nom. La femelle, plus imposante que le mâle, porte ses œufs entre ses nageoires ventrales et les ventile régulièrement. À l'instar de certaines espèces des forêts de Bornéo, et dans le même but de passer inaperçue, la faune sous-marine a su développer des trésors d'imagination pour se camoufler.

Il stocke ses gros œufs bien visibles, un comportement rarissime dans la nature puisqu'il semble utiliser sa progéniture pour appâter ses proies.


Nicolas et Laurent approchent une crinoïde. L'animal peut se mouvoir en utilisant ses nombreux bras. Il aime se fixer sur les gorgones, toujours bien placées dans les courants, et comme elle, capture le plancton de passage. Les crinoïdes, proches de la famille des étoiles de mer, sont le refuge privilégié de nombreux petits animaux. Mais ce crabe plat est incapable de survivre hors de l'entrelacs des bras protecteurs. La bienveillance des crinoïdes s'applique aussi aux crevettes qui y ont élu domicile. Elles ont revêtu la couleur de leur hôte dont elle privilégie les bras jaunes. Ce poisson-grenouille, ou antennaire, aime se prendre pour une éponge. Tout, jusqu'à la texture de sa peau, est étudié. Seul l'œil, la partie la plus difficile à grimer, trahit sa présence.

Au bal costumé de la faune sous-marine, cette autre espèce de poisson-grenouille a fort bien réussi son déguisement. De nombreuses excroissances de peau reproduisent parfaitement algues et petits vertébrés. Sur son dos, dans un cocon de mucus, il stocke ses gros œufs bien visibles. Un comportement rarissime dans la nature puisqu'il semble utiliser sa progéniture pour appâter ses proies. Les plongeurs ont la chance d'assister à l'éclosion en milieu naturel de l’un de ses œufs. Comme pour le zèbre dans la savane, la succession de lignes sombres et claires de la rascasse volante perturbe la vision de ses ennemis. Ce poisson-papillon préfère jouer la carte de leurre avec un faux œil placé à l'opposé du vrai.

L'œil reste le point faible du camouflage. Le poisson-crocodile, grand chasseur à l’affût, est parvenu à développer une dentelle dermique pour le masquer. Sa vision n'en est pas affectée. Celle du mérou oriflamme est binoculaire : ses deux énormes yeux placés en avant de la tête sont synchrone. Peut-être est-ce ce regard humain, inhabituel dans le monde sous-marin, qui l’a fait surnommer l'ami des plongeurs.

Si la majorité des seiches joue la carte souvent gagnante du camouflage parfait, la petite seiche flamboyante a plus d'un tour dans son sac. Dans un premier temps, lorsqu'un danger se présente, elle mise sur des couleurs vives et des motifs répulsifs. Si ce subterfuge ne suffit pas, en un centième de seconde elle prend la couleur du terrain. La minuscule pieuvre à anneaux bleus n'a pas besoin de se déguiser. Dans le monde sous-marin, personne ne s'amuserait à la croquer sous peine de mort immédiate. Ses motifs bleu électrique sont un avertissement. En vingt minutes, sa salive peut tuer un homme.

Dans la plupart des écosystèmes sous-marins existent des stations-service où officient des crevettes ou des poissons-nettoyeurs. Il suffit de se présenter, d'ouvrir grand la bouche, le service est gratuit. Nicolas tente l’expérience. Les redoutables murènes sont des habituées de ces nettoyages express. Quand elle estime le service terminé, elle le fait savoir par un tremblement. La crevette quitte alors son poste de travail sans attendre.

Les poissons-chats rayés vivent en banc compact. Encore une stratégie visant à se défendre. Outre leur aiguillon venimeux, la compacité du groupe déroute les prédateurs qui ne savent plus où donner de la tête et des dents. Ils se nourrissent en fouillant collectivement le sable de leur barbillon. Et quoi qu'il se passe, ils se coordonnent pour rester en formation serrée. Stratégie de groupe aussi chez les poissons-perroquets géants. De vraies têtes de mules qui vivent en troupeau compact et dont la bosse qui orne leur front, sert le cas échéant à briser les coraux. Comme les buffles dans la savane, ils parcourent le récif broutant tout sur leur passage. Leur déjection est probablement à l'origine des plus beaux sables coralliens de la planète.

Ces carangues à gros yeux utilisent leurs robes métallisées pour perturber l'adversaire. Suivant l'angle d’incidence des rayons du soleil, en modifiant sa trajectoire, le banc tout entier brille ou devient sombre. Les grandes bécunes, aussi appelées barracudas, font de même, lorsque surviennent requins ou thon à dents de chien. Mais elles n'ont rien à craindre de Nicolas et Laurent qui remontent des profondeurs.

Les eaux entourant cet îlot proche de Bornéo se distinguent encore par la présence d'innombrables tortues vertes. Et l'on peut y être le témoin privilégié de l'une des phases les plus intimes de leur cycle de vie. Leur ballet amoureux est toujours mouvementé. L'accouplement peut durer plusieurs heures. La femelle nage pour deux et remonte régulièrement à la surface pour respirer. Il est fréquent que plusieurs autres mâles tentent de déstabiliser l'élu pour prendre sa place.

Exploration d'une grotte, sépulture de tortues

Cette île, reposant directement sur le fond de l'océan, sans aucune attache avec le plateau continental, réserve une ultime surprise aux plongeurs. Lors de la dernière glaciation, la partie haute du tombant était à l'air libre et a subi l'érosion responsable des grottes impressionnantes que l'on y trouve. Aujourd'hui totalement immergée, l'une d'elle est devenue un bien curieux cimetière. Le boyau d'accès est étroit. Laurent et Nicolas ont dû enlever leur système de respiration autonome.

L'ambiance est étrange, sépulcrale. Le sol est jonché de squelettes de tortues. On a dit qu'elles venaient peut-être ici pour mourir...

Dans le tunnel, un fil d'Ariane aide à se diriger et surtout à ressortir sans difficulté le moment venu. À l'intérieur de la grotte, en raison de l'absence totale de lumière du jour, il n'y a aucun coraux et donc pas de poissons. L'ambiance est étrange, sépulcrale. Le sol est jonché de squelettes de tortues. On a dit qu'elles venaient peut-être ici pour mourir mais la raison de ces restes est bien plus dramatique. Bien que les tortues marines puissent plonger fort longtemps, elles sont tout de même obligées d'aller respirer à la surface.

Ces animaux, qui adorent les cavités, se sont fait piéger. Incapables de trouver la sortie, après être longtemps resté près du plafond en espérant atteindre l'air libre, les tortues se sont tout simplement noyées. Leurs carcasses sont lentement redescendues et se sont posées sur le sol. Les plongeurs s'évadent du cimetière des tortues vertes et retrouvent le grand bleu.

Les Bajau Sulu, cultivateurs d'algues

Après l'extraordinaire spectacle sous-marin auquel la nature les a conviés, et pour mettre un terme à cette aventure, Nicolas Hulot et Laurent Ballesta ont mis le cap sur l’un des villages Bajau Sulu suspendu au-dessus du corail. C'est encore un autre monde ici. On est posé comme ça, sur ces pilotis, sur un plateau corallien, dans l'immensité de la mer de Célèbes. Ça c'est le fameux agar agar qui va servir dans l’agroalimentaire, dans la pharmacopée comme gélifiant. Quand on voit la manière artisanale comme ces Bajau Sulu qui sont des pêcheurs d'algues utilisent la nature - car ce qu'ils prennent d'un côté, ils le rendent de l'autre car ce sont des cultivateurs, des paysans des mers - fait un contraste assez saisissant avec ce qu'on a vu de l'autre côté de ce bras de mer sur l'île de Bornéo et comment on exploite la forêt tropicale humide.

Pour donner un seul chiffre, il faut savoir que pendant 400 millions d’années disparaissait une espèce de plante tous les 27 ans alors que maintenant il en disparaît plus de cinq par jour sous l'effet des activités de l’homme. Et pour donner une triste notion de l'ampleur des dégâts, il faut savoir qu'à chaque seconde où l'on parle, il disparaît l'équivalent d'un stade de football de forêt tropicale humide sur Terre, ce qui fait à peu près 40 hectares à la minute. Alors qu'on sait pourtant qu'au XXe siècle, 60 % déjà ont disparu et que les satellites constatent que chaque année c'est environ 2 % qui continuent à s’éroder.

Ça veut dire qu’avant la fin de la moitié du siècle qui s'ouvre, l'ensemble de ces forêts aura disparu et avec elles, le cortège d'extinction d’espèces animales et végétales. Des milliers d'espèces vont être anéanties. C'est un sacrilège absolu, c'est comme si on regardait les bras croisés brûler le musée du Louvre, mais c'est en plus d'une stupidité totale car quelque part, c'est notre avenir que nous sommes en train de torpiller. On aura évidemment emmagasiner de très belles images dans nos têtes pendant ce voyage, tant sous l'eau qu'en surface, mais on aura aussi gardé cette image assez pathétique, ce regard terrifié des orangs-outans privés de territoire qui incarnent toutes ces espèces que l'on a acculé au seuil du précipice de l’extinction.

Et plus encore, plus tragique, ce sont ces deux petits bébés orangs-outans orphelins, blottis l'un contre l'autre avec ce regard terrorisé, qui refusaient de quitter les épaules de leurs soigneurs quand on tentait de les remettre à la vie sauvage. Tant ils savent que dorénavant, dans ces petites forêts, il y a un danger terrifiant, un nouveau prédateur : l'homme.


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Présentation du documentaire en vidéo
Carte de l'île de Bornéo Carte de Bornéo
Nicolas Hulot perché sur des pinacles N. Hulot sur des pinacles
Cavernes souterraines Cavernes souterraines
Nicolas Hulot et l'entomologiste Arthur Anker Nicolas Hulot et Arthur Anker
L'Aéroplume, pour voler près des chauves-souris Aéroplume, ballon dirigeable
Nicolas Hulot prend place dans l'Aéroplume Nicolas Hulot dans l'Aéroplume
L'Aéroplume en vol dans la grotte L'Aéroplume en vol
Des chauves-souris par milliers Chauves-souris
L'Aéroplume sort de la grotte Aéroplume
Insecte développant un mimétisme Insecte et mimétisme
Nicolas Hulot admire la canopée Nicolas dans la canopée
Un insecte qui se confond avec la feuille Insecte feuille
Un phasme Phasme
Mandibules d'un scarabée Scarabée
Larve de trilobite Larve de trilobite
Une mante prête à capturer sa proie Mante
Mante-orchidée Mante-orchidée
Sur les hauteurs du Mont Kinabalu Mont Kinabalu
La végétation sur les flancs de la montagne Arbustes
La plus petite plante carnivore au monde Plante carnivore
Un loris Loris
Gecko volant sur une feuille Gecko volant
Rhinocéros de Sumatra Rhinocéros de Sumatra
Nicolas observe un orang-outan Observation d'orangs-outans
De fins observateurs Fins observateurs
De jeunes orangs-outans Fins observateurs
Véritables penseurs Regard d'un orang-outan
En voie de disparition Orang-outan
Amos et son fils Cueilleurs
Arbre à poison Arbre à poison
Préparation du poison pour les sarbacanes Préparation du poison
Après la chasse au sanglier Chasse au sanglier
Un nasique au sommet d'un arbre Nasique
Un autre nasique, de dos Nasique
Un bébé nasique Bébé nasique
Nicolas et Laurent vont plonger Hulot et Ballesta
Plongée avec une caméra grossissante Caméra grossissante
Porcelaine au mimétisme parfait Porcelaine
Poisson-papillon Poisson-papillon
Poisson-crocodile Poisson-crocodile
Pieuvre à anneaux bleus Pieuvre à anneaux bleus
Nettoyage gratuit pour les plongeurs Crevette nettoyeur
Les crevettes nettoient les murènes Crevette nettoyeur
Poissons-perroquets géants Poisson-perroquet
Carangues Carangue
Tortues vertes Tortues vertes
Carcasses de tortues Carcasses de tortues
Nicolas chez les Bajau Sulu Bajau Sulu
Apprentissage de la culture des algues Culture des algues
 
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